Jeudi le 3 mai 2018 se tenait le symposium du CEFIR sur les mouvements dits de « citoyens souverains ». L’événement, intitulé « Sovereign citizens in Canada » se déroulait au département d’études théologiques de l’Université Concordia. Le but de cette journée était de réunir les principaux spécialistes canadiens de cette nébuleuse surprenante qui prône le retrait individuel de toute relation avec l’État en se basant sur un arsenal pseudo-légal reconnu par les seuls membres de la mouvance.

Dans un premier temps, Barbara Perry, de l’University of Ontario Institute of Technology, a présenté « The Anti-authority Movement in Canada: Scripts and Strategies », issu de recherches menées en collaboration avec David Hofmann de l’University of New Brunswick et Ryan Scrivens, chercheur postdoctoral à l’Université Concordia. Mme Perry, par ailleurs l’une des principales chercheuse sur les mouvements d’extrême droite au Canada, a montré la très grande diversité des tendances associées aux mouvements anti-autorité au Canada, présenté une typologie des personnes impliquées et des modes d’action privilégiés.

Donald Netolitzky, avocat et conseiller légal à la Cour du banc de la reine de l’Alberta, a par la suite décrit le concept de « pseudo-loi » dans sa présentation « A Rebellion of Furious Paper: Pseudolaw as a Revolutionary Legal System ». M. Netolitzky est possiblement l’un des plus grands connaisseurs de la mouvance des citoyens souverains et des groupes apparentés au Canada du fait de son travail acharné pour contrer les tactiques légales des adhérents de cette mouvance. Il a ainsi déconstruit l’arsenal pseudo-légal utilisé par les militants anti-autorité pour tenter de se soustraire à l’autorité de l’État.

Susan J. Palmer, co-chercheuse au CEFIR et professeure associée à l’Université Concordia, a partagé ses analyses de la littérature issue de la mouvance anti-autorité et des propos recueillis en entretien auprès de certains militants dans « “Nostalgia for the Future?” Religion, Politics and Science in the Visionary Literature of Five Canadian Anarchists ».

Gabrielle Lavigne-Desnoyers, analyste au Service de police de l’agglomération de Longueuil, est venue partager les résultats de son mémoire de maîtrise en criminologie dans « The enrolment process for Quebec sovereign citizens: an exploratory study ». Elle y a analysé comment des individus en viennent à adhérer progressivement à l’idéologie des citoyens souverains en passant par la recherche de validation de leurs craintes et l’adhésion à certaines théories du complot. L’idéologie des citoyens souverains fournit ainsi une apparence de solution globale à des problèmes spécifiques vécus par les individus.

Enfin, Donald Netolitzky est revenu présenter sur la diffusion mondiale du phénomène pseudo-légal et des mouvements anti-autorité dans « A Pathogen Astride the Minds of Men: The Epidemiological History of Pseudolaw ». Utilisant la métaphore du virus pour décrire la dissémination et l’extinction de certaines branches de la mouvance à travers le monde ainsi que son adaptation et sa mutation aux divers contextes nationaux. Pour Netolitzky, cette mouvance ne constitue pas un mouvement social dans la mesure où elle ne contribue en rien à faire avancer des idées ou des changements, mais conduit simplement ses adhérents à des pertes considérables sur le plan matériel et juridique, d’où l’utilisation de la métaphore virale.

Le directeur du CEFIR Martin Geoffroy a finalement conclu cette journée par quelques remarques générales en soulignant les similarités et les différences entre les mouvements d’extrême-droite et les citoyens souverains.  Les textes des présentations feront l’objet de publications en français dans un ouvrage collectif à venir.